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Conférence sur les rapports entre médias et quartiers populaires (Safran, Amiens-Nord)
Conférence sur médias, banlieue et quartiers populaires/ Au Safran, le 21 décembre 2017
Médias et quartiers populaires: une autre relation est-elle possible?
Conférence animée par Flora Beillouin, journaliste en résidence à Carmen
Les journalistes invités:
-Ixchel Delaporte, journaliste à L’HUMANITE,
-Julien Pitinome: photoreporter. Labo 148, Roubaix. S’occupe du journal gratuit FUMIGENE.
Vincent Aguano, coordinateur de CARMEN (sur Amiens) - Canal Nord.
Prise de notes sur la conférence:
La réflexion sur les médias et les quartiers populaires commence en 2005 avec l’affaire à Clichy-sous-Bois. Elle pose la question du sensationnalisme: volonté de parler de la drogue et des violences. Rubrique dans L’Humanité (le journal) sur les quartiers. Trois semaines d'émeute avec 5 journalistes dans L'Humanité qui s'occupe de cette affaire à Clichy-Sous-Bois.Relation difficile entre les médias et les quartiers.
Magazine Fumigène. Journal trimestriel gratuit. Parler de ce qui se passe bien sans oublier ce qui s'y passe de mal. Produire de l'original. PB de la maltraitance médiatique des quartiers. Faire des reportages en collaboration avec les médias. Cf. association Carmen dans les quartier Nords. Volonté d'une image plus rare mais plus juste.
Autre prise de conscience avec Charlie Hebdo. Est-ce que les méthodes ont changé? Réponse: non. Reportage très négatif même dans Envoyé Spécial (France 2). Parfois dans la presse écrite c'est mieux comme dans Le Monde et Le Parisien. Le PB. Pas de traitement régulier. Une défiance s'est installée. Est-ce qu'on respecte vraiment les gens lorsqu'on fait du sensationnel?
La télé fonctionne comme une boite de production. Pour vivre, on propose des sujets sensationnels. Ex: la drogue dans les quartiers. Les chaines prennent ce qui marche. Ce qu'on a envie c'est de savoir que cela se passe mal dans les quartiers. Il faut un rapport de force avec le rédacteur en chef. PB avec Amandine Chambellan qui a monté en épingle un quartier à Grenoble (La Villeneuve)
Les questions à se poser sur le journalisme:
1) Question du point de vue: que veut-on montrer? Quel regard porte-t-on sur la banlieue?
2) Cela prend du temps. Il faut donc en donner aux journalistes.
Reportage: une journée de montage pour deux minutes de reportage.
3) PB de la source. Souvent, les médias se basent sur l'AFP. Il y a des erreurs. Se baser uniquement sur la dépêche AFP, c'est faire du journalisme de bureau. Pas assez de moyens pour faire du travail de terrain. Il faut donc en donner, accepter de payer des abonnements...
4) Est-ce que les journalistes reviennent ou pas dans les lieux où ils ont fait les reportages? Revenir oblige à être plus juste, à nouer de vraies relations avec les gens.
Livre à lire: La banlieue du 20h. Très bon livre d’après la présentatrice.
Le sujet de ce livre: Jeune journaliste, Jimmy fait ses débuts au service des faits divers du journal télévisé. On l'envoie couvrir la banlieue : il découvre alors comment on fabrique l'information sur ces quartiers populaires.
On déshumanise les rapports humains dans les quartiers.
5)La formation des journalistes. Les journalistes viennent souvent de milieux privilégiés. Mais ce qui compte avant tout, c'est l'intention du journaliste. Il existe une prépa égalité des chances à Lille: 20 places seulement!
Comment les gens des quartiers peuvent-ils devenir des journalistes? Est-ce qu'on leur donne les moyens? C'est la peur qui fait inventer des histoires.
Ex.développé par Ixchel Delaporte d’une erreur journalistique sur les quartiers populaires:
Le 26 septembre 2013, l’émission Envoyé Spécial sur France 2 diffusait un reportage sur le quartier de la Villeneuve à Grenoble. De simple quartier populaire, la Villeneuve était métamorphosé en véritable banlieue, ghetto où le chômage et la délinquance tiennent le haut du pavé. Cette transformation médiatique de la Villeneuve en cité malfamée a suscité la colère des habitants qui depuis ont entamé une véritable réflexion autour de leur quartier et du traitement journalistique qui lui a été imposé. Des séances de décryptage du reportage ont été organisées en compagnie du sociologue des médias Jérôme Berthaut, en novembre, une présentatrice d’Envoyé Spécial en déplacement à Grenoble est interpellée au sujet du reportage et s’excuse auprès des habitants et finalement en décembre, l’association des « Habitants de la Crique Sud » décide de citer le directeur de France Télévisons devant le tribunal de Grenoble pour « diffamation publique ». Le jugement rendu en Juin dernier retient finalement l’irrecevabilité de la plainte. Pour autant le collectif de défense de la Villeneuve continue son action et organise samedi 22 novembre un forum « Médias et quartiers populaires ».(Journaliste mise en cause, Amandine Chambellan, journaliste de France 2, ENVOYE SPECIAL). S'ils n'ont pas gagné en justice, ils ont gagné la bataille médiatique.
Comment faire pour trouver des sujets intéressants sur les quartiers populaires?
Les associations sont importantes. On peut aller au bistrot pour discuter avec les gens des quartiers. Il faut aussi nouer des liens durables pour que les gens se sentent en confiance et puissent se confier ensuite.
Ex.trouvé: les familles monoparentales dans les quartiers populaires (sujet choisi par Ixchel Delaporte). Les femmes ont accepté de témoigner car la journaliste connaissait les personnes depuis 4 ans. Son but: c’est créer des belles relations, pas juger les gens. Elle a expliqué que même si elle n’approuvait pas leur choix, elle a noué parfois de belles relations avec des dealers, car elle a su voir la personne derrière les actes qu’eux-mêmes réprouvent parfois.
6) le problème du flux d’informations. L’objectif est-il de nous abreuver d’images ou de donner de l’information de qualité? Les journalistes ont pour mission de faire un reportage en une minute. Les journalistes n’ont pas toujours le temps de faire un bon reportage de terrain.
Tout le monde peut devenir aujourd'hui émetteur d'informations. Le métier du journalisme a donc changé.
7)intégrer le droit de réponse dans les médias, afin que les gens puissent se défendre ou corriger une erreur. L’absence d’écoute conduit à une automédiatisation des quartiers, par le biais de facebook ou de blogs personnels. On apprend à se défendre par soi-même. PB du courrier picard qui ne véhiculent pas toujours des informations justes.
Réponse à une question sur le journalisme postcolonial: Ixchel Delaporte évoque la marche pour l'égalité en 1983 ratée. Contexte postcolonial: émergence des ratonnades (violence exercée à l’égard des personnes d’origine nord-africaine. On utilise aussi ce terme pour parler de violences à l’égard de minorités). Cette marche a été récupérée par le parti socialiste, alors que les gens des quartiers populaires s’exprimaient vraiment.
Diffusion de 4 courts métrages sur les quartiers populaires:
1)Cours: “Ils cultivent notre haine”. Court-métrage réalisé par un jeune, présent lors de la soirée: sensible et émouvant.
2)Un jeune est attiré par le théâtre et l’écriture, mais le milieu dans lequel il vit est un frein pour son développement personnel. On ne le stimule pas, on n’accorde pas de valeur à cette passion naissante.
3)Film d’animation “Tombés du nid”. Des jeunes des quartiers sont sensibles à des canetons ayant perdu leur mère. Ils cherchent à les retrouver parce qu’ils se sont perdus, afin de les ramener vers la canne. Ce film montre la sensibilité de ces jeunes dont l’un d’entre eux veut épater la fille qu’il convoite par un sujet sur les animaux.
4)Youri (référence à l’astronaute, au nom de la cité et au prénom du jeune garçon). Sur le regard que l’on peut porter sur le lieu dans lequel on vit. Cité de Youri Gargarine. Un jeune homme du quartier, Youri, a la tête dans les étoiles. Il regarde le monde dans lequel il vit autrement et cela le conduit à être plus heureux, à mettre de la joie et de la bonne humeur dans un lieu en décrépitude.
Pour en savoir plus sur les invités:
Ixchel Delaporte Journaliste à L’Humanité depuis 14 ans, Ixchel Delaporte a commencé au service Médias, puis a fait une incursion au service Monde de L’Humanité Dimanche avant de collaborer au service Tribune-idées. Elle a ensuite sillonné pendant 8 ans les quartiers populaires de France pour la rubrique Société. Parallèlement, Ixchel Delaporte a réalisé 3 documentaires pour France Culture. Depuis septembre 2016, elle prend en charge les thématique police, justice et terrorisme. La plupart de ses articles sont accessibles sur son blog Côté Quartiers
Vincent Aguano, coordinateur de l’association CARMEN – Canal Nord, pionnière des télévisions de quartiers née à Amiens en 1984. Vincent Aguano a exercé pendant 6 ans la fonction de président de la Fédération de l’Audiovisuel Participatif, réseau national de médias de proximité, et collabore avec de nombreux médias de quartiers en Europe (Allemagne, Serbie, Espagne, Slovaquie, Angleterre, Italie…)
Julien Pitinome est photoreporter, il navigue dans plusieurs domaines de la photographie : presse, reportage, entreprise, spectacle, danse. Côté presse, il a cofondé le collectif ŒIL et fait partie de l’équipe qui a relancé la publication de FUMIGENE MAG en 2015. Un journal qui se veut « engagé, positif, indépendant et citoyen, dynamité par des banlieusards, militants associatifs, reporters, artistes et autres porte-voix ». Julien Pitinome développe actuellement en collaboration avec l’ESJ, Fablab Channel et La Condition Publique, le Labo 148, média de jeunes à Roubaix.
t important de se poser:
1) Question du point de vue: que veut-on montrer? Quel regard porte-t-on sur la banlieue?
2) Cela prend du temps. Il faut donc en donner aux journalistes.
Reportage: une journée de montage pour deux minutes.
3) PB de la source. Souvent les médias se basent sur l'AFP. Il y a des erreurs. Se baser uniquement sur la dépêche AFP, c'est faire du journalisme de bureau. Pas assez de moyens pour faire du travail de terrain. Il faut donc en donner, accepter de payer des abonnements...
4) Est-ce que les journalistes reviennent ou pas dans les lieux où ils ont fait les reportages? Revenir oblige à être plus juste, à nouer de vraies relations avec les gens.
Livre à lire: La banlieue du 20h. Très bon livre d’après la présentatrice.
Le sujet de ce livre: Jeune journaliste, Jimmy fait ses débuts au service des faits divers du journal télévisé. On l'envoie couvrir la banlieue : il découvre alors comment on fabrique l'information sur ces quartiers populaires.
On déshumanise les rapports humains dans les quartiers.
5)la formation des journalistes. Les journalistes viennent souvent de milieux privilégiés. Mais ce qui compte avant tout, c'est l'intention du journaliste. Il existe une prépa égalité des chances à Lille: 20 places seulement! Comment les gens des quartiers peuvent-ils devenir des journalistes? Est-ce qu'on leur donne les moyens? C'est la peur qui fait inventer des histoires.
Ex.développé par Ixchel Delaporte d’une erreur journalistique:
Le 26 septembre 2013, l’émission Envoyé Spécial sur France 2 diffusait un reportage sur le quartier de la Villeneuve à Grenoble. De simple quartier populaire, la Villeneuve était métamorphosé en véritable banlieue, ghetto où le chômage et la délinquance tiennent le haut du pavé. Cette transformation médiatique de la Villeneuve en cité malfamée a suscité la colère des habitants qui depuis ont entamé une véritable réflexion autour de leur quartier et du traitement journalistique qui lui a été imposé. Des séances de décryptage du reportage ont été organisées en compagnie du sociologue des médias Jérôme Berthaut, en novembre, une présentatrice d’Envoyé Spécial en déplacement à Grenoble est interpellée au sujet du reportage et s’excuse auprès des habitants et finalement en décembre, l’association des « Habitants de la Crique Sud » décide de citer le directeur de France Télévisons devant le tribunal de Grenoble pour « diffamation publique ». Le jugement rendu en Juin dernier retient finalement l’irrecevabilité de la plainte. Pour autant le collectif de défense de la Villeneuve continue son action et organise samedi 22 novembre un forum « Médias et quartiers populaires ».(Journaliste mise en cause, Amandine Chambellan, journaliste de France 2, ENVOYE SPECIAL). S'ils n'ont pas gagné en justice, ils ont gagné la bataille médiatique.
Comment faire pour trouver des sujets intéressants sur les quartiers populaires?
Les associations sont importantes. On peut aller au bistrot pour discuter avec les gens des quartiers. Il faut aussi nouer des liens durables pour que les gens se sentent en confiance et puissent se confier ensuite.
Ex.trouvé: les familles monoparentales dans les quartiers populaires (sujet choisi par Ixchel Delaporte). Les femmes ont accepté de témoigner car la journaliste connaissait les personnes depuis 4 ans. Son but: c’est créer des belles relations, pas juger les gens. Elle a expliqué que même si elle n’approuvait pas leur choix, elle a noué parfois de belles relations avec des dealers, car elle a su voir la personne derrière les actes qu’eux-mêmes réprouvent parfois.
6) le problème du flux d’informations. L’objectif est-il de nous abreuver d’images ou de donner de l’information de qualité? Les journalistes ont pour mission de faire un reportage en une minute. Les journalistes n’ont pas toujours le temps de faire un bon reportage de terrain.
Tout le monde peut devenir aujourd'hui émetteur d'informations. Le métier du journalisme a donc changé.
7)intégrer le droit de réponse dans les médias, afin que les gens puissent se défendre ou corriger une erreur. L’absence d’écoute conduit à une automédiatisation des quartiers, par le biais de facebook ou de blogs personnels. On apprend à se défendre par soi-même. PB du courrier picard qui ne véhiculent pas toujours des informations justes.
Réponse à une question sur le journalisme postcolonial: Ixchel Delaporte évoque la marche pour l'égalité en 1983 ratée. Contexte postcolonial: émergence des ratonnades (violence exercée à l’égard des personnes d’origine nord-africaine. On utilise aussi ce terme pour parler de violences à l’égard de minorités). Cette marche a été récupérée par le parti socialiste, alors que les gens des quartiers populaires s’exprimaient vraiment.
Diffusion de 4 courts métrages sur les quartiers populaires:
1)Cours: “Ils cultivent notre haine”. Court-métrage réalisé par un jeune, présent lors de la soirée: sensible et émouvant.
2)Un jeune est attiré par le théâtre et l’écriture, mais le milieu dans lequel il vit est un frein pour son développement personnel. On ne le stimule pas, on n’accorde pas de valeur à cette passion naissante.
3)Film d’animation “Tombés du nid”. Des jeunes des quartiers sont sensibles à des canetons ayant perdu leur mère. Ils cherchent à les retrouver parce qu’ils se sont perdus, afin de les ramener vers la canne. Ce film montre la sensibilité de ces jeunes dont l’un d’entre eux veut épater la fille qu’il convoite par un sujet sur les animaux.
4)Youri (référence à l’astronaute, au nom de la cité et au prénom du jeune garçon). Sur le regard que l’on peut porter sur le lieu dans lequel on vit. Cité de Youri Gargarine. Un jeune homme du quartier, Youri, a la tête dans les étoiles. Il regarde le monde dans lequel il vit autrement et cela le conduit à être plus heureux, à mettre de la joie et de la bonne humeur dans un lieu en décrépitude.
Pour en savoir plus sur les invités:
Ixchel Delaporte Journaliste à L’Humanité depuis 14 ans, Ixchel Delaporte a commencé au service Médias, puis a fait une incursion au service Monde de L’Humanité Dimanche avant de collaborer au service Tribune-idées. Elle a ensuite sillonné pendant 8 ans les quartiers populaires de France pour la rubrique Société. Parallèlement, Ixchel Delaporte a réalisé 3 documentaires pour France Culture. Depuis septembre 2016, elle prend en charge les thématique police, justice et terrorisme. La plupart de ses articles sont accessibles sur son blog Côté Quartiers
Vincent Aguano, coordinateur de l’association CARMEN – Canal Nord, pionnière des télévisions de quartiers née à Amiens en 1984. Vincent Aguano a exercé pendant 6 ans la fonction de président de la Fédération de l’Audiovisuel Participatif, réseau national de médias de proximité, et collabore avec de nombreux médias de quartiers en Europe (Allemagne, Serbie, Espagne, Slovaquie, Angleterre, Italie…)
Julien Pitinome est photoreporter, il navigue dans plusieurs domaines de la photographie : presse, reportage, entreprise, spectacle, danse. Côté presse, il a cofondé le collectif ŒIL et fait partie de l’équipe qui a relancé la publication de FUMIGENE MAG en 2015. Un journal qui se veut « engagé, positif, indépendant et citoyen, dynamité par des banlieusards, militants associatifs, reporters, artistes et autres porte-voix ». Julien Pitinome développe actuellement en collaboration avec l’ESJ, Fablab Channel et La Condition Publique, le Labo 148, média de jeunes à Roubaix.
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