• Henry David Thoreau, La désobéissance civile (Thème BTS: Seuls avec tous)

    L'individu comme force de résistance au système (thème: Seuls avec tous)

     

    Je vous conseille la lecture de cet opuscule qui se lit en une demi-heure, voire une heure si on médite sur le texte et qui comprend une soixantaine de pages. Il est téléchargeable gratuitement sur une tablette kindle. La Désobéissance civile du philosophe Henry David Thoreau est totalement d'actualité, avec les gilets jaunes qui s'opposent au pouvoir en place lorsqu'ils le trouvent injuste. Thoreau a refusé de payer ses impôts aux Etats-Unis, car il estimait qu'ils servaient à de mauvaises causes qu'il ne soutenait pas: à savoir la guerre contre le Mexique et l'esclavage des noirs. Il explique que ce qui compte, ce n'est pas de respecter la loi, mais de faire le bien, d'avoir une attitude vertueuse sans attendre que la majorité s'y soumette. La majorité ne tend pas forcément vers le bien (cf: Psychologie des foules de Gustave Le Bon). Comme le disait Victor Hugo dans son poème "Ultima verba": "Et s'il n'en restait qu'un je serai celui-là!" On doit s'opposer à tout pouvoir inique et avoir le courage de ses opinions. Thoreau a fait de la prison en raison de son refus de payer ses impôts, mais il explique que rien ne peut entraver sa liberté de conscience. On peut l'enfermer physiquement, mais on ne pourra jamais emprisonner sa conscience. S'opposer à ce qui nous semble illégitime, c'est être un homme au sens noble du terme. Il a toujours voulu joindre le geste à la parole. Faire ce en quoi on croit, malgré les risques encourus. Etre pragmatique plus que théorique.

    Thoreau est mort jeune, il avait seulement 44 ans.

     

    Une belle vidéo qui introduit le texte :

     

    Voici quelques citations tirées de son opuscule:

    "Il n'est pas souhaitable de cultiver le même respect pour la loi et pour le bien. La seule obligation qui m'incombe est de faire le bien." 

    "La loi n'a jamais rendu les hommes un brin plus justes, et par l'effet du respect qu'ils lui témoignent les gens les mieux intentionnés se font chaque jour les commis de l'injustice."

    "La masse des hommes sert ainsi l'Etat non point en humains, mais en machines avec leur corps."

    "Une élite, les héros, les patriotes, les martyrs, les réformateurs au sens noble du terme, et des hommes, mettent aussi leur conscience au service de l'Etat et en viennent forcément, pour la plupart à lui résister."

    "Tous les hommes reconnaissent le droit à la révolution, c'est-à-dire le droit de refuser fidélité et allégeance au gouvernement et le droit de lui résister quand sa tyrannie ou son incapacité sont notoires et intolérables."

    "Il y a des milliers de gens qui par principe s'opposent à l'esclavage et à la guerre, mais qui en pratique ne font rien pour y mettre un terme (...)."

    "Il existe des lois injustes: consentirons-nous à y obéir?"

    "Si, de par sa nature, cette machine veut faire de nous l'instrument de l'injustice envers son prochain, alors je vous le dis, enfreignez la loi."

    "En outre, tout homme qui a raison contre les autres constitue déjà une majorité d'une voix."

    "Si un seul honnête homme cessait, dans notre Etat du Massachussetts de garder des esclaves, venait vraiment à se retirer de cette confrérie, quitte à se faire jeter dans la prison du Comté, cela signifierait l'abolition de l'esclavage en Amérique. Car peu importe qu'un début soit modeste: ce qui est bien fait au départ est fait pour toujours."

    "Je n'ai payé aucune capitation depuis six ans ;  cela me valut de passer une nuit en prison (...). Je compris que, si un rempart de pierre s'élevait entre moi et mes concitoyens, il s'en élevait un autre, bien plus difficile à escalader ou à percer, entre eux et la liberté dont moi, je jouissais. Pas un instant, je n'eus le sentiment d'être enfermé et les murs me semblaient un vaste gâchis de pierre et de mortier."

    "Si une plante ne peut vivre selon sa nature, elle dépérit. Un homme de même."

     

    Prolongement (extrait d'un article sur Thoreau, tiré de Sciences humaines)

     

    "Une nuit en prison

    Pour avoir refusé de payer ses impôts en protestation contre l’esclavagisme et contre la guerre au Mexique, le philosophe passe une nuit en prison en 1846. Dans Résistance au gouvernement civil, écrit en 1849, (rebaptisé De la désobéissance civile), il théorise et légitime ce qu’il vient de faire et qu’il nomme la désobéissance civile. Au cœur de cet essai, il décrit l’individu comme seul souverain. Il légitime sa résistance au gouvernement, au nom d’une éthique personnelle de la justice. L’État est vu comme une machine dont il faut contrôler les abus : « Que votre vie soit une force de frottement pour stopper la machine », exhorte Thoreau.

    On comprend dès lors sa méfiance vis-à-vis d’un gouvernement établi sur le seul critère de la majorité qui n’est rien d’autre qu’une loi du plus fort et la victoire du conformisme. D’où une défiance envers le vote, qui ne saurait se suffire à lui-même : voter, « ce n’est rien faire pour la justice. Cela revient à exprimer mollement votre désir qu’elle l’emporte ». Un sage « n’abandonne pas la justice aux caprices du hasard », écrit un Thoreau excédé par le somnambulisme coupable de ses contemporains face à l’esclavage.

    La désobéissance s’impose parfois comme un devoir quand l’individu ne parvient plus à se reconnaître dans sa propre société. Aussi le consentement aux lois et aux normes doit être sempiternellement questionné. Loin de mettre à mal la démocratie, la contestation et la résistance assurent sa survie. La démocratie véritable se forge dans la self-reliance ou « confiance en soi », un concept instauré par Emerson pour dire cette possibilité du veto, la récusation du conformisme et de la résignation. C’est dans cette optique que s’inscrivent ceux qui, d’Edward Snowden aux pratiquants du « délit de solidarité », en passant par Occupy Wall Street, justifient le devoir de désobéissance civile au nom de valeurs de justice qui leur paraissent supérieures."

     

    Biographie

    1817 : naissance de Thoreau le 12 juillet à Concord (Massachusetts).

    1833 : Thoreau étudie à Harvard.

    1836 : parution de Nature, de Ralph W. Emerson

    1837 : Thoreau commence à écrire son journal.

    1840 : premier numéro de The Dial, la revue transcendantaliste à laquelle participe Thoreau, avec Emerson, Margaret Fuller, Amos Bronson Alcott, Jones Very.

    1845 : Thoreau construit une cabane sur les rives du lac Walden puis s’y installe pour une retraite pastorale.

    1846 : le 25 juillet, Thoreau passe une nuit en prison en raison des impayés d’impôts locaux (six ans d’arriérés). Il en sort grâce à sa tante qui paye ses arriérés.

    1847 : retour de Thoreau à la civilisation, qui tient une conférence sur son séjour à Walden.

    1849 : parution de De la désobéissance civile.

    1851 : Thoreau affecte beaucoup de temps à l’écriture de son journal et prononce des conférences.

    1854 : parution de Walden ; conférence « L’esclavage au Massachusetts ».

    1859 : pendaison de l’abolitionniste John Brown dont il fait l’éloge funèbre ; plaidoyer pour John Brown.

    1860 : l’état de santé de Thoreau se dégrade.

    1861 : parution de Marcher.

    1862 : mort de Thoreau le 6 mai, à Concord, à 44 ans.

    1864 : parution de Les Forêts du Maine, à titre posthume.

    1865 : parution de Cape Cod, à titre posthume.

    1906 : parution du Journal de Thoreau, à titre posthume. 

     


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