• L.LN°1: importance des droits naturels, Olympe de Gouges

     

    Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne.

    L’importance des droits de la nature.

     

    V.

    1Les lois de la nature et de la raison défendent toutes actions nuisibles à la société : tout ce qui n'est 2pas défendu par ces lois, sages et divines, ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire 3ce qu'elles n'ordonnent pas.

     

    VI.

     

    4La loi doit être l'expression de la volonté générale ; toutes les citoyennes et citoyens doivent 5concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation ; elle doit être la même pour 6tous : toutes les citoyennes et tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, doivent être également 7admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leurs capacités, et sans autre 8distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

    VII.

    9Nulle femme n'est exceptée ; elle est accusée, arrêtée et détenue dans les cas déterminés par la loi. 10Les femmes obéissent comme les hommes à cette loi rigoureuse.

     

    VIII.

     

    11La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être 12puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée 13aux femmes.

    IX.

     14Toute femme étant déclarée coupable, toute rigueur est exercée par la loi.

     

    X.

     

    15Nul ne doit être inquiété pour ses opinions même fondamentales, la femme a le droit de monter 16sur l'échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la tribune(1) pourvu que ses 17manifestations ne troublent pas l'ordre public établi par la loi.

     

    XI.

     

    18La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de la 19femme puisque cette liberté assure la légitimité des pères envers les enfants. Toute citoyenne 20peut donc dire librement : je suis mère d'un enfant qui vous appartient, sans qu'un préjugé 21barbare la force à dissimuler la vérité sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas 22déterminés par la loi.

     

    Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 1791.

    Vocabulaire 

    (1)Tribune : estrade d’où un orateur s’adresse à une assemblée.

     

    Grammaire

    1-Analysez la négation « nul ne peut être contraint » (l.2).

    2-Analysez la proposition (nature et fonction) de « ce qu’elles n’ordonnent pas. » (l.3). Remplacez -la par un nom.

    3-Analysez la négation « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires » (l.11). Transformez la phrase à la forme affirmative.

    4-Analysez la proposition(nature et fonction) « pourvu que ces manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la loi » (l. 15-16). Reformulez cette proposition en utilisant un autre mot subordonnant qui soit synonyme.

     

     

    Correction de la lecture linéaire sur « l’importance des droits de la nature » pour Olympe de Gouges.

     

    Comment éviter la répétition d’Olympe de Gouges ?

    Figure féminine de la révolution française, défenseuse des droits de la femme, rédactrice…

     

    Introduction

    a)Contexte historique et littéraire : Ce texte, publié en 1791, peu après la révolution française, est un plaidoyer en faveur du droit des femmes durant le Siècle des Lumières dans lequel l’égalité devient un combat. Olympe de Gouges se réapproprie le discours juridique, dans une sympathie dénuée de complaisance. Loin de les considérer comme de simples victimes, elle insiste sur leur responsabilité. Elle souhaite la parité hommes-femmes qui consiste en un partage équitable des fonctions au sein de la vie politique et sociale. Ses revendications abordent des sujets aussi divers que l’éducation des filles, le divorce ou la légitimation des enfants naturels, conçus en dehors du mariage.

    b)Présentation du texte : Ce texte s’adresse à l’Assemblée nationale comme l’indique la phrase en italiques, précédant le préambule : « à décréter par l’Assemblée nationale dans ses dernières séances ou dans celle de la prochaine législature. »

    c)Mouvements du texte : Dans un premier mouvement, nous verrons comment Olympe de Gouges défend les lois de la nature et de la raison, ce qu’on peut appeler le droit naturel (l.1 à 8). Dans un second mouvement, nous montrerons combien l’égalité des deux sexes devant la loi (l.9 à 13). Enfin, dans un troisième mouvement, nous analyserons l’importance de la liberté d’expression et de pensée (l.14-20).

    d)Problématique : Comment ce texte, prenant une forme juridique, défend-il l’égalité entre l’homme et la femme, en se fondant sur le droit naturel ?

     

    Développement

    I-Le droit naturel implique une égalité entre les hommes et les femmes (l.1 à 8)

      Qu’est-ce que le droit naturel ? Le droit naturel s’oppose au droit positif qui se modifie en fonction de l’évolution des mœurs. Le droit naturel est l’ensemble des droits que chaque individu possède du fait de son appartenance à l'humanité et non du fait de la société dans laquelle il vit. Olympe de Gouges défend dans ce texte le droit naturel, car il comprend notamment le droit à la vie, à la santé, à la liberté et à la propriété. Il est inhérent à l'humanité, universel et inaltérable. Olympe de gouges fait référence à ce droit naturel à travers le groupe nominal « les lois de la nature et de la raison ». Elle qualifie ces lois de « sages et divines » montrant par là leur caractère universel et le fait qu'elles soient au-dessus des lois humaines. Le déterminant indéfini « toutes » pour déterminer « les actions nuisibles » renvoie à l’idée de totalité. Ces lois doivent être justes et s’opposer à toutes les actions mauvaises pour la société, sans exception. L’utilisation du pronom indéfini « nul » met en évidence le fait que personne ne peut être contraint par autre chose que ces lois naturelles. Il renferme donc un espace de liberté, notamment pour la femme qui est oppressée, le verbe « contraindre » est utilisé ici (l.2 : « nul ne peut être contraint »), car elle est soumise à un droit positif qui n’est pas un droit naturel (article V).

       L’utilisation du présent de vérité générale montre le caractère universel de ces lois édictées qui suivent la nature humaine : « La loi doit être l'expression de la volonté générale ; toutes les citoyennes et citoyens doivent concourir personnellement, ou par leur représentant, à sa formation (…). » (l.4-5) Cette figure féminine de la révolution française insiste sur l’implication masculine et féminine de la création des lois. Cela se manifeste dans le texte par l’utilisation du féminin et du masculin dans l’emploi du mot « citoyens » : « toutes les citoyennes et les citoyens ». Notons que le féminin devant le masculin, alors que c’est généralement le contraire. Le déterminant indéfini « toutes » insiste sur la globalité.

      La notion d’égalité est également très présente : il s’agit de combattre et d’écrire pour l’égalité. L’utilisation du pronom indéfini « la même » (l.5) renvoie à la parité entre hommes et femmes, faisant écho au concept de « volonté générale » (l.4). La loi doit tenir compte de ce que chacun veut. L’adjectif « égaux » (l.6) renforce cette idée. Après avoir énoncé les lois dans les grandes lignes, la rédactrice introduit des exemples de parités : accès à toutes les dignités, à savoir à une fonction éminente comme celle de la politique ou des dirigeants, à des emplois prestigieux ; l’accès aux places et emplois publics, on songe alors à l’administration française avec une place dans l’instruction publique et dans les hôpitaux par exemple. Olympe de Gouges met en évidence l’importance d’éviter les discriminations et de se baser uniquement sur les vertus et les talents de chaque femme : les vertus renvoyant aux qualités morales, quand les talents font plutôt référence aux qualités intellectuelles ou intérieures.

     

    II-L’homme et la femme doivent être égaux devant la loi, sans discrimination (l.9 à 13)

       Olympe de Gouges insiste sur le fait que la femme ne doit pas avoir de traitement de faveur devant la loi : « Les femmes obéissent comme les hommes à cette loi rigoureuse. » (l.10). L’adverbe de comparaison « comme » favorise la mise en avant de ce lien d’égalité pour les bonnes comme les mauvaises actions. La loi protège tout le monde et peut aussi sanctionner ceux qui désobéissent. Les femmes doivent s’y conformer et accepter leurs droits comme leurs devoirs, sans vouloir s’y soustraire. En somme, tout le monde doit être logé à la même enseigne.

      Les lois ne doivent pas être arbitraires, c’est pourquoi elles doivent avoir été pensées avant la sanction : « nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit. » (l.11-12). Cette négation restrictive (ne…que) met en exergue l’adverbe « antérieurement ». On pourrait reformuler la phrase sous cette forme : une personne peut être punie uniquement en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit (avant l’infraction à la loi). Il ne s’agit pas d’inventer des lois au moment présent, mais de les avoir votées avant, pour suivre un idéal de justice. La notion de peines nécessaires est également défendue. Ce qui est nécessaire, c’est ce qui est essentiel. Il ne s’agit pas de punir pour de petites erreurs. C’est pourquoi il est important de réfléchir collectivement à la loi, afin qu’elle soit discutée et acceptée par l’ensemble de la communauté, en l’occurrence les hommes et les femmes. Chacun doit contribuer à la promulgation des lois et s’engager à les respecter ensuite.

     

    III-Défense de la liberté d’expression et de pensée (l.14 à 22)

       Olympe de Gouges défend la liberté de pensée qu’elle considère comme un droit fondamental : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions même fondamentales. » (l.14). Le parallélisme de construction  (=GN+ verbe au présent + COD) « la femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit avoir également le droit de monter à la tribune » (l.14-15) insiste à nouveau dans la forme comme dans le fond sur la notion d’égalité dans le meilleur des cas comme « monter à la tribune », pouvoir s’exprimer librement en public, comme dans le pire des cas, « monter sur l’échafaud. » La rigueur de la loi, sévère est inflexible, s’applique dans tous les cas de figures. « Monter à la tribune » est un acte défendu, mais à une condition, émise par   : « pourvu que ses manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la loi ». On pourrait remplacer la locution conjonctive « pourvu que » par « si » ou « dans la mesure où ». La prise de paroles ne doit pas entrainer de violences. La liberté possède les limites encadrées par la loi. S’exprimer publiquement n’est pas dénué de toutes contraintes.

        La liberté d’expression est considérée comme un droit supérieur comme l’indique le superlatif relatif « un des droits les plus précieux de la femme » (l.17). Le superlatif relatif « le plus précieux » exprime ici le degré le plus élevé des droits de la femme. Il est dit « relatif » car il est lié à la femme, comme l’indique ce complément de l’adjectif. Mais pourquoi cette importance? La proposition subordonnée circonstancielle de cause « puisque cette liberté assure la légitimité des pères envers leurs enfants » l’explique. Une femme doit pouvoir dire librement qui est le père de son enfant, sans en avoir honte, sauf si la loi le lui interdit. Olympe de Gouges a elle-même été une enfant naturelle  (=enfant née hors mariage) d’un père qui ne l’a pas reconnue. Elle était la fille naturelle du Marquis Jean-Jacques de Pompignan. Celui-ci, après avoir été le parrain de sa mère, puis son compagnon de jeux, renouera avec la mère d’Olympe de Gouges et lui donnera un enfant. Son père biologique ne  reconnaitra pas Olympe de Gouges officiellement. Elle se bat donc pour que les enfants naturels puissent être reconnus par la société et pris en charge. Elle veut les mêmes droits pour tous les enfants, légitimes ou non. Elle souhaite que la vérité ne soit pas dissimulée, mais autorisée. Cette idée est exprimée dans la proposition subordonnée circonstancielle de concession : « sans qu’un préjugé barbare la force à dissimuler la vérité(…) » (l.20-21). Cette concession introduit une contradiction entre deux faits qui semblent pourtant liés par une relation de cause à effet. On doit pouvoir dire qui est le père, sans se l’interdire, sans avoir à dissimuler son identité.

     

    Conclusion

    a)Bilan : La notion d’égalité est très présente dans ce texte autant dans la forme que dans le fond. Le style épouse la cause défendue avec les parallélismes de construction et le lexique de l’égalité plutôt récurrent. Olympe de Gouges bâtit son argumentaire sur la notion de droit naturel qui a une portée universelle.

    b)Ouverture : Ce texte vise à donner un véritable statut juridique aux femmes. Cet appel à une vraie révolution juridique nécessite de la part de son auteure de l’audace et du courage. En 1791, moment où cette déclaration est écrite, la France est à la veille de la Terreur révolutionnaire. En 1793, toute contestation est étouffée. Fin 1792, Olympe de Gouges, de son vrai nom Marie Gouze, attaque violemment Marat et Robespierre (deux chefs révolutionnaires) dont elle souhaite publiquement la mort. Elle est alors condamnée à mort par le tribunal révolutionnaire pour « écrits attentatoires à la souveraineté du peuple. » Elle sera alors guillotinée en 1793. Elle n’est pas exécutée pour ses idées féministes, mais après sa mort, un journal assure qu’elle a aussi été punie « pour avoir oublié les vertus qui conviennent à son sexe », en voulant « être homme d’Etat. »

    Cette déclaration des droits de la femme et la citoyenne particulièrement claire et incisive passe pourtant inaperçue durant la révolution française. Ce n’est qu’en 1986 qu’elle sera publiée dans son intégralité pour la première fois, grâce à la militante Benoite Groult qui a rédigé un livre sur Olympe de Gouges, intitulé : Ainsi soit Olympe de Gouges. L’introduction de son ouvrage a pour titre : « Olympe de Gouges la première féministe moderne ». Cette déclaration d’Olympe de Gouges est considérée aujourd’hui comme un discours féministe majeur.

     

    Pour aller plus loin :

    -Les femmes dans la révolution française (musée Carnavalet) :

    https://www.dailymotion.com/video/x2y2bnd

     

    Correction de la grammaire

    1-Analysez la négation « nul ne peut être contraint » (l.2).

    NUL est ici un pronom indéfini à valeur négative. Il s’emploie avec l’adverbe NE et a le sens d’AUCUN/PERSONNE. L’adverbe NE se trouve à gauche du verbe. NUL s’écrit en général au singulier, car il signifie « zéro ». On peut transformer cette phrase à la forme affirmative par : « quelqu’un peut être contraint ».


    Il s’agit d’une négation partielle, car lorsqu’on transforme la phrase à la forme affirmative, « nul » est remplacé par « quelqu’un » : quelqu’un peut être contraint. Le mot négatif est remplacé, il n’est pas effacé comme dans la négation totale.

     

    2-Analysez la proposition (nature et fonction) de « ce qu’elles n’ordonnent pas. » (l.3). Remplacez -la par un nom.

    Il s’agit d’une proposition subordonnée relative substantive qui a la fonction de COD. QUESTION : A faire quoi ? « ce qu’elles n’ordonnent pas. » On peut remplacer par : nul ne peut être contraint à faire cela sans l’ordre des lois. C’est parce qu’on peut remplacer par un GN qu’on parle de proposition subordonnée relative substantive.

     

    3-Analysez la négation « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires » (l.11). Transformez la phrase à la forme affirmative.

    « ne…que » est une négation restrictive. On peut remplacer par : « La loi doit établir uniquement des peines strictement et évidemment nécessaires. »

     

    4-Analysez la proposition(nature et fonction) « pourvu que ces manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la loi » (l. 15-16). Reformulez cette proposition en utilisant un autre mot subordonnant qui soit synonyme.

    Il s’agit d’une proposition subordonnée d’hypothèse (nature), complément circonstanciel d’hypothèse (fonction). On peut remplacer par SI ou DANS LA MESURE Où : « si ces manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la loi »/ « dans la mesure où ces manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la loi. »

     

     


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